Les Gitans de Sara

En 2020, la ville des Saintes-Marie-de-la-Mer n'a pas accueilli l’un des plus grands rassemblements du sud de la France en raison de l’épidémie de Covid-19. Le 23 avril dernier, Rolland Chassain, maire des Saintes, a pris la décision d’annuler le célèbre pèlerinage gitan qui se tient chaque année les 24 et 25 mai dans la petite ville camarguaise. Là où depuis des siècles, plusieurs milliers de Tsiganes, Manouches, Gitans et Roms venant des quatre coins d’Europe, se réunissent pour vénérer Sainte Sara, Sara-la-Kâli, la vierge noire patronne des gitans.
C’est une triste nouvelle pour des dizaines de milliers de fidèles qui chaque année attendent ce grand rassemblement pour se retrouver ou faire baptiser leurs enfants. Et une entaille réelle à des millénaires de traditions.
Je suis allée pour la première fois assister au pélerinage des Saintes-Marie-de-la-Mer en mai 2016. Ce n’était pour moi que quelques kilomètres à faire depuis Marseille. Et hormis cette envie tenace qui me tenait depuis plusieurs années à aller « voir là-bas », je n’avais à ce moment-là aucune idée de ce que j’allais vivre aux côtés d’une communauté souvent mal connue et mal aimée.
J’ai eu la chance d’être accueillie pendant ces deux jours pleins de festivités par un petit groupe de gitans. Ils étaient installés, comme chaque année, tout près des plages. Entre roulottes de bois, chevaux, musique et grandes tablées, il émanait de ce micro campement un immense bonheur : celui d’être simplement là. Bien loin de l’ambiance des caravanes modernes alignées les unes à côté des autres sur les parkings ceinturant la petite ville camarguaise.
Hasard de rencontre ou pas, ils m’ont très rapidement invitée à leur table et m’ont acceptée, moi la «gadjé», comme l’une des leurs. Au-delà d’une immense célébration qui embrase les ruelles du centre-ville et les plages des Saintes, au-delà de cette ferveur intense propre à tout pèlerinage mêlant chrétiens sédentaires et croyants tsiganes, c’est cette rencontre inattendue, chaleureuse et pleine d’amour qui marquera mon premier pèlerinage aux Saintes. Cette année-là et l’année suivante, tous m’accueilleront à nouveau avec la même générosité.
Yan le Hollandais, des décennies à rouler en Europe avec sa roulotte et son cheval Abel, Esmeralda, 68 ans de pèlerinage, ou encore Freya à la beauté nordique, Claudio et son «tambourino» ou Roland, le ferrailleur qui m’appelle sans cesse « cousine ». Autant de gens et d’histoires singulières, mais tous soudés par les liens de la communauté tsigane ou des «gens du voyage» et tous animés de la même foi, furieusement...heureuse !
Ces photos prises en mai 2016 et mai 2017, retracent la rencontre intime avec une poignée de Gitans et de Manouches, aux marges des grandes processions et manifestations de foi rassemblant les 24 et 25 mai des milliers de pèlerins. Deux jours de festivités qui célèbrent l’arrivée de Marie Jacobé, Marie Salomé et leur servante Sara, chrétiennes persécutées fuyant la Palestine sur une barque sans gouvernail, à l’aube de la chrétienté.
Reportage complet disponible par mail (photos, portraits, textes, interviews) : ce_ravier@hotmail.com